Etat d ’urgence pour la forêt

sylvicultureC ’était la dernière assemblée générale des sylviculteurs du sud ouest pour Jean Louis Martres. Chacun a salué  son  engagement considérable durant 22 ans pour la défense de la forêt d ’Aquitaine.

Quelques jours auparavant, en  annonçant son départ, il déclarait« ma démission est aussi un acte de protestation. Nos propositions n ’auront servi à rien »

Je ne peux que confirmer ses propos vu les difficultés rencontrées pour l ’obtention des aides de l ’Etat, ou récemment lors de l ’examen de la loi de modernisation de l ’agriculture.

A l ’Assemblée nationale, j ’ai défendu les propositions des sylviculteurs sur ce texte. Mais que ce soit le système assurantiel, la suppression du seul tenant pour les surfaces éligibles à un PSG, la certification comme présomption de garantie de gestion durable, ou la création du fonds de mobilisation pour la filière, et j ’en passe…Nous n ’avons rien obtenu.

Ou plutôt si ! : un système d ’assurance inopérant et inefficace qui refuse d ’utiliser une partie du compte d ’épargne, pour l ’investissement. C ’est contre-productif pour un secteur d ’activité qui a plus que jamais besoin d ’investir pour replanter, mais aussi pour se positionner sur un marché de plus en plus concurrentiel.

C ’est d ’autant plus incompréhensible que seulement 5 % de la surface de la forêt française est assurée. D ’autant plus incompréhensible que lors de nos entretiens, le ministre de l ’agriculture semblait avoir mesuré tous les enjeux.E t au-delà, le refus avancé de toute aide de l ’État après 2017 pour les propriétaires non assurés est aberrant.

Cette loi montre une véritable incompréhension sur les besoins et sur l ’urgence des décisions à prendre. Ce n ’est pas seulement un problème financier d ’aides dans le cadre des sinistres. C ’est un problème de fonds. C ’est le regard porté sur les sylviculteurs qu ’il faut modifier. C ’est la profession qu ’il faut respecter avec la spécificité de ses contraintes économiques.

Comment négliger à ce point une filière qui représente 400.000 emplois en France ?  Elle pèse aussi lourd, en Aquitaine, que la filière viticole.

Comment ne pas réagir lorsque les investissements consacrés à la forêt sont parmi les plus faibles d ’Europe ? Que la France est le pays qui plante le moins ? Que son déficit commercial dépasse six milliards d ’euros, alors que sa forêt reste l ’une des plus vastes d ’Europe ?

À l ’évidence, la dépendance de la France à l ’égard d ’autres pays européens qui investissent et plantent davantage, comme l ’Allemagne, la Pologne et la Turquie, ne fera que s ’accroître. A l ’évidence, les objectifs du Grenelle de l ’environnement sont largement illusoires.http://www.pascalegot.fr/wp-includes/js/tinymce/plugins/wordpress/img/trans.gif

On peut craindre que la manière dont la forêt est prise en compte, ne permettra même pas de faire face à l ’augmentation prévisible de la demande de bois. C ’est tout de même un sacré paradoxe… et ça risque aussi d ’être un sacré gâchis !

En l ’occurrence, je ne vise par le ministre de l ’agriculture qui, je le crois,  a bien compris ces enjeux économiques. A l ’évidence, les blocages sont ailleurs. Je pense que Bercy y a très largement contribué…

Pour autant,  il ne faut pas que cette incompréhension tourne au divorce. Personne n ’ y  agagner. Et certainement pas les sylviculteurs.Il est impératif de renouer le dialogue avec les pouvoirs publics mais aussi avec tous les acteurs de la filière bois. Il faut aller vite si l ’on veut éviter que la « catastrophe lente » évoquée par J.L. Martres, à juste titre, ne soit inéluctable.

La tâche du nouveau président, Bruno Lafon n ’a rien d ’aisée, d ’autant que pointe aujourd ’hui une catastrophe sanitaire avec le développement des scolytes. Mais je sais qu ’il croit, lui aussi, aux vertus du dialogue et de la ténacité. Souhaitons que le Gouvernement puisse l ’entendre.